GUEST WRITER/NADEGE FUMEX

N’être à nouveau que soi

(French)

© Nadège Fumex: portrait d’autrice

À propos de l’autrice

N’être à nouveau que soi : ces mots me viennent pour définir ma poésie. Avec ce jeu de mot sur “naître”, tel un baptême, un éveil, un rebondissement. Et l’essentiel : soi. Être soi au plus profond dans une simplicité dénuée de toute fioriture. 

Depuis toujours, me semble-t-il, je lis. De tout, tout le temps. Des romans, des récits, des livres jeunesse, des policiers, des essais, du théâtre, de la poésie, de la bande dessinée, du classique, du contemporain. Le livre est un ami, un refuge, un voyage, un outil de connaissance, mais il est surtout l’endroit où je trouve des réponses à mes questions, à mes doutes, à mes joies, à mes peines, et lui seul sait tracer des possibles auxquels je n’aurais pas penser. 

Mon goût des mots m’a amené à faire des études de lettres mais l’arrivée de mes enfants m’a portée sur un autre territoire, celui de maman à temps plein, de m’élever – grandir – avec eux. Je précise que c’est un choix. Durant des années, j’ai rédigé des chroniques littéraires via mon blog aujourd’hui disparu. Je recevais des services de presse à domicile, lisais et partageais mes impressions. Cette activité que j’adorais a fini par me dévorer. L’obligation avait pris le pas sur le plaisir. Alors j’ai fermé le blog et ouvert une autre fenêtre : Instagram. Sous mes photos, je m’appliquais à écrire de petits textes. Je lisais aussi à voix-haute de la poésie dans des vidéos. Dans le même temps, je redécouvrais le bonheur de lire ce dont j’avais envie-soif-besoin.

Désormais, je n’avais plus à rendre compte de mes lectures mais seulement les apprécier, les ressentir, les laisser infuser. Et c’est dans cet état d’esprit – libre, ouvert – que j’ai commencé à écrire mes premiers poèmes. Comme une évidence. Ne plus parler des livres des autres mais ouvrir la vanne de mes propres sentiments. Je prenais plaisir à jouer avec les mots, les rimes, les assonances et autres allitérations. Je pratiquais aussi le caviardage (biffer des passages d’une page d’un livre, sauf certains mots, créant ainsi une phrase poétique). 

Mes poèmes sont courts, ramassés, implicites pour laisser au lecteur la place d’y glisser ses émotions, ses histoires, son imaginaire. Certains de mes textes ont été publiés dans des revues : Oubien feuille d’art et de littérature, Miroir ou encore Lichen. Et mon premier recueil de poésie, Comme la rivière ses méandres, a vu le jour en août 2025 édité par Les bonnes feuilles édition – avec impression du livre à la demande.

Aujourd’hui, l’écriture m’est nécessaire. Je ne me suis jamais sentie aussi bien dans mon corps et dans ma tête depuis que les mots viennent de moi. Ils sont ma réalité. Je me sens enfin moi-même et pas seulement un vague reflet dans le miroir.

    n’être à nouveau que soi

    mon reflet n’est pas moi

© Nadège Fumex: couverture de recueil de poésie Comme la rivière ses méandres de Nadège Fumex

© Nadège Fumex: Comme la rivière ses méandres

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dans le ciel rincé 

d’un soleil retors

près du creux percé

là, je m’évapore

je deviens goutte

larme perle

rosée pluie

rouge sang

encre bleue

je fuis je cours je tombe

je m’extrais du monde

et quand le verre est plein

je reviens

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© Nadège Fumex

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à bout de bras

la main nue dira – l’étendue

d’un geste agile

le doigt filera – ténu

palimpseste fragile   

non sans heurts – cousu 

  

au jeu des paumes 

la ligne de cœur – fantôme

éperdue

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j’ai des mots de tête 

au bout de mes maux

des notes de cœur 

en ronds de fumée

pas de pare-feu

dans mon parfum

ma voix est encensoir

en lettres CAPITALES

j’attise les braises

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© Nadège Fumex: le caviadrage ou la technique d’écriture créative où l’on supprime des mots d’un texte existant (imprimé ou numérique) pour en faire émerger un nouveau, souvent de nature poétique, et développer ainsi la créativité et la capacité à aller à l’essentiel. 

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je suis corps

étoffes odeurs chaleur

un point de fuite sur l’horizon

je suis à la trace 

les empreintes sans âge

de ce monde qui tombe 

je    suie, cendre

       grain, poussière

       le silence de l’estran

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© Nadège Fumex: le caviadrage

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il y a toujours 

un mot manquant 

sur le bout 

de ma langue

un trou à la surface

une absence

un vide douleur

une eau dormante

un invisible bleu

il me faut dénuder

un à un les fils 

à retordre

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© Nadège Fumex: le caviadrage

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soulevez la langue 

faites baver les mots

qu’ils émulsionnent 

de bouche en bouche

qu’ils prennent accents 

et coups de sang

qu’ils voyagent

de page en nuage

qu’ils s’écorchent

ou s’enracinent

soulevez la langue

elle sèmera

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j’écris

car je le sais

tout fuit

le vent

assèche déjà

ma peau

bientôt il chassera  

la fleur de mes pensées 

sauvages

mais dans le creux des pages

les mots auront leur lit 

et pourront toujours

traverser la rivière

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© Nadège Fumex: le caviadrage

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soudain je vis

l’écume et ma vie

à la surface 

de l’eau bitume

des mots morsures

en écho sur

le grand bord – dur

des vers en pente

à sauce piquante

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© Nadège Fumex: le caviadrage

Plus d’informations sur l’autrice:

Recueil de poésie Comme la rivière ses méandres: https://www.poesie.io/nadege-fumex/comme-la-riviere-ses-meandres

Revue Miroir: Nadège Fumex: https://revuemiroir.fr/category/nadege-fumex/

Instagram: @nadegefumex

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Anonyme 2025/09/07

Ana Merci de me faire découvrir.
Nadège Fumex quelle douceur à qq part Normal .
J espère que ses textes hauts en couleur iront de l autre côte de la mer .
Pour s abreuver de hasard et de coïncidences rassurantes
Mille Mercis à Vous Deux Mesdames.
C est de mon siège chez moi que je découvre ses beau textes.
Merci Mme Malnar pour cette délicatesse retrouvée avec cette autrice Merveilleuse
Mme Fumex